Si les taux hypothécaires sont remontés, alors que les prix ont atteint un niveau record, la démographie et la conjoncture continuent de soutenir le marché.

DANS LE CANTON 21 novembre 2023
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Le marché ralentit après la hausse des taux d’intérêt

Les effets de la remontée des taux hypothécaires sur le marché immobilier commencent à être visibles. Si le prix des appartements en PPE a continué d’augmenter au premier semestre, de 1,6% en moyenne cantonale, celui des maisons individuelles s’est replié de 0,6%. Les volumes de transactions ont aussi sensiblement baissé, d’environ 20% pour les premiers et de quelque 15% pour les secondes.

dernier, les effets de la remontée des taux hypothécaires sur le marché immobilier ont été plus visibles au premier semestre 2023. La baisse du nombre de transactions s’est renforcée: alors que les ventes de maisons individuelles ont diminué d’environ 7% et celles de PPE de quelque 10% au cours de la seconde moitié de 2022 par rapport à la même période une année auparavant, elles affichaient au premier semestre un recul deux fois plus important, soit d’environ -15% et -20%.

De plus, selon les données du cabinet de conseil Wüest Partner, les prix des maisons individuelles se sont repliés de 0,6% en moyenne dans le canton; s’ils ont encore augmenté dans des districts comme ceux d’Aigle, de la Broye-Vully, du Jura-Nord vaudois et de Lausanne, ils ont reculé dans les autres régions du canton, jusqu’à -2,2% dans l’Ouest lausannois. Rien de tel en revanche du côté des PPE, dont les prix ont augmenté de 1,6% en moyenne. Seul le district d’Aigle a connu un fléchissement (-0,4%) dans ce segment. Globalement, il faut remonter au début de la crise du COVID ou à 2017 pour retrouver un marché de l’immobilier en propriété individuelle aussi peu animé.

La BNS fait une pause

Cela dit, alors que la remontée des taux hypothécaires avait été très rapide durant l’année 2022, ceux-ci se sont stabilisés depuis début 2023 (lire également en page 6). En ce qui concerne la Banque nationale suisse (BNS), après avoir relevé à cinq reprises son taux directeur, qui est passé de -0,75% à 1,75% entre juin 2022 et juin 2023, elle l’a maintenu inchangé à l’occasion de son examen de la situation économique et monétaire de septembre. Notamment, l’institut d’émission a maintenant davantage de marge de manœuvre grâce au recul de l’inflation. Alors que le renchérissement avait culminé à 2,8% en moyenne sur 2022, avec un pic à 3,5% en août, il est passé sous la barre des 2% en juin et s’inscrivait à 1,7% en octobre.

Mis à part la remontée des taux hypothécaires – qui restent, cela dit, relativement peu élevés en comparaison historique – ainsi que le niveau élevé des prix, les fondamentaux demeurent favorables pour l’immobilier en propriété individuelle. La croissance démographique renforce la demande: au cours du premier semestre, la population résidente permanente vaudoise a augmenté d’environ 1%, une hausse alimentée en particulier par l’immigration.

L’économie du canton se montre résiliente face aux chocs conjoncturels qui se succèdent grâce à sa diversification dans des domaines à haute valeur ajoutée. Elle crée des emplois et l’accroissement naturel de la population n’est pas suffisant pour combler le besoin de main-d’œuvre des entreprises; nombre de postes sont ainsi occupés par des personnes venant d’autres pays.

Fin de la détente sur le marché du logement

Du côté de l’offre, la construction de logements peine à suivre: environ 4 600 nouveaux objets, en location ou en propriété individuelle, sont mis sur le marché en moyenne chaque année depuis 2021, soit environ 1 300 de moins que la moyenne des cinq années précédentes. Le taux de logements vacants a de nouveau reculé, passant sous la barre de 1%, à 0,98%. La détente dont avait bénéficié le marché du logement jusqu’en 2020, avec un taux de vacance qui a culminé à 1,37%, semble faire partie du passé. Autre signe dans ce sens: après une baisse de quelque 22,1% des loyers offerts sur le marché depuis leur pic en 2014, ceux-ci ont augmenté de 0,9% au premier semestre.

Quant à la conjoncture, elle a ralenti dans le sillage de la baisse de régime de l’économie mondiale. Ainsi, la croissance est attendue en repli dans le canton, passant de 2,4% en 2022 à 1,4% cette année et à 1,3% l’an prochain, selon les données publiées par la Commission Conjoncture vaudoise. Par contre, la demande domestique reste robuste, tandis que, à 3,3% en octobre, le chômage reste à l’un de ses plus bas niveaux depuis le début du siècle. Avec un nombre élevé de places vacantes et de nombreuses entreprises qui ressentent des difficultés de recrutement, le marché de l’emploi est tendu. Les indicateurs de la Commission Conjoncture vaudoise donnent aussi l’image d’une économie vaudoise robuste. S’ils fléchissent tout en restant en territoire positif dans les services, ils sont stables ou en amélioration dans les autres branches. Cela concerne notamment l’industrie ou l’hôtellerie-restauration, qui sont confrontées aux effets de l’inflation et de la faiblesse de la conjoncture mondiale sur la demande étrangère, ou la construction et le commerce de détail.

Poursuite du ralentissement ou du fléchissement

Si plusieurs facteurs soutiennent le marché immobilier, les effets de la remontée des taux hypothécaires, alors que les prix ont atteint des niveaux record, sont maintenant visibles. En fonction des objets et des régions, le ralentissement de la hausse, voire la stabilisation ou le fléchissement des prix, devrait se poursuivre aussi bien dans les villas que dans les PPE. Dans l’immobilier de rendement, la hausse des rendements obligataires tempère la demande des investisseurs et des investisseuses. Enfin, les surfaces commerciales restent soumises aux évolutions structurelles, comme le développement du télétravail, la progression du commerce en ligne et le tourisme d’achat.