Des taux d’intérêt bas et un contexte économique robuste malgré une croissance en baisse: l’immobilier vaudois bénéficie de conditions favorables.
La situation n’est plus la même qu’entre 2004 et 2012, période durant laquelle les prix de l’immobilier progressaient fréquemment de plus de 8% par an. Cependant, une certaine dynamique est de retour dans le canton depuis 2017 et les prix augmentent de nouveau de 3% à 4% par an. Avec une hausse de 1,6% des prix des maisons familiales individuelles au premier semestre et de 2,2% de ceux des appartements en propriété par étages (PPE), les effets du repli du marché entre 2014 et 2016 ont été effacés et celui-ci a atteint des nouveaux plus hauts.
Cela s’explique par plusieurs facteurs, à commencer par une poursuite du recul des taux d’intérêt. Cet été, le rendement des obligations de la Confédération à dix ans est tombé à des niveaux historiquement bas, en dessous de -1%. À l’heure d’écrire ces lignes, il était un peu remonté, à environ -0,6%, mais restait largement négatif. Ce plongeon s’explique notamment par une dégradation des perspectives économiques dans la zone euro, qui se reflète également en Suisse, ainsi que par de nouvelles injections de liquidités et un léger renforcement de ses taux négatifs par la Banque centrale européenne (BCE).
Certains intervenants anticipaient que la Banque nationale suisse (BNS)emboîterait le pas à la BCE et renforcerait aussi les taux d’intérêt négatifs introduits entre décembre 2014 et janvier 2015. Toutefois, lors de son examen de la situation économique et monétaire du 19 septembre, la BNS n’a pas modifié sa politique monétaire.
Le niveau des prix s’explique également par une baisse ces dernières années de l’offre de nouveaux logements en propriété individuelle, maisons familiales et PPE. Depuis 2016, les appartements en location représentent plus de la moitié des nouveaux logements construits dans le canton, contre moins de 20% durant les deux décennies qui ont précédé. Malgré cela, le taux de logements vacants est resté stable, à 1,1% au 1er juin 2019. Sur le long terme, la détente est toutefois marquée: en 2009, le taux de logements vacants était tombé à 0,4%. Quant aux loyers des logements proposés sur le marché, ils ont reculé de 1,4% au premier semestre, portant la baisse cumulée depuis 2014 à environ 17%.
D’autres facteurs expliquent aussi que la dynamique soit moins forte qu’il y a une dizaine d’années. Premièrement, en raison du niveau atteint par les prix, la part de la population disposant des moyens nécessaires pour accéder à la propriété a fortement reculé. Ensuite, la croissance démographique a fléchi. Si la population vaudoise a franchi le cap symbolique des 800 000 habitants en 2018, sa hausse de 0,7% était inférieure de moitié à la moyenne des dix années qui ont précédé (+1,5%). Selon les données provisoires de l’Office fédéral de la statistique au deuxième trimestre, aucune accélération de la croissance démographique ne se dessine dans le canton cette année.
À l’inverse, l’immobilier de rendement reste prisé. Du fait des taux d’intérêt très bas, des investisseurs institutionnels, mais aussi des particuliers, souhaitent investir dans la pierre. Le canton de Vaud n’est pas seul concerné, loin de là. Les prix des immeubles de rendement ont augmenté de 80% dans le pays, alors que les loyers de l’offre baissent et que certains cantons connaissent des taux de vacance élevés.
Les autorités, la BNS ou l'Autorité fédérale de surveillance des marchés financiers (FINMA) craignent une correction des prix et appellent tous les acteurs du marché à faire preuve de prudence. L'Association suisse des banquiers a, quant à elle, resserré ses directives en matière de financement des immeubles de rendement.
Sur le plan économique, les fondamentaux sont solides, même si les perspectives ne sont plus aussi bonnes que quelques trimestres auparavant. Par rapport aux 2,8% de hausse du PIB vaudois en 2018, la croissance ralentit cette année. De plus, les prévisions ont été révisées à la baisse, à 1,4%, alors qu’il y a une année il était encore question d’une croissance de 2,1%. Le marché de l’emploi est robuste, avec un taux de sans-emploi stable à 3,3% en septembre, soit sa valeur la plus basse depuis quinze ans. Et ce, pendant que les créations d’emplois restent solides dans le canton de Vaud et qu’aucune dégradation n’est en vue sur ce plan.
Aucun basculement n’est attendu sur le marché de l’immobilier. En ce qui concerne la propriété individuelle, les taux d’intérêt demeurent bas et l’offre est restreinte; à l’inverse, la démographie reste peu dynamique et la part de la population qui peut envisager de devenir propriétaire s’est réduite par rapport à il y a quelques années, même si l’envie reste très présente parmi les ménages qui disposent de moyens suffisants. L’équilibre subtil entre ces facteurs devrait au minimum soutenir les prix. Dans le segment locatif, la demande est toujours forte, mais la production est aussi importante. Enfin, dans les surfaces commerciales, deux effets peuvent se combiner: le tassement de la conjoncture et les changements structurels.