Pour les nouveaux bâtiments, l’isolation thermique répond globalement aujourd’hui dans le canton à des exigences qui correspondent au standard MINERGIE.
D’une commune vaudoise à l’autre, les émissions de CO2 par m2 de surface utile liées au chauffage et à la production d’eau chaude ne sont pas les mêmes. De nouveaux chiffres calculés par le centre de recherche Crem à Martigny, créé en 1986 en collaboration avec l’EPFL, mettent ainsi en évidence que leurs profils ne sont pas uniformes.
La rénovation des logements est un enjeu majeur de la transition énergétique. Pour les ménages helvétiques, près de la moitié de la consommation d’agents fossiles, huile de chauffage ou gaz, sert au chauffage des locaux et de l’eau chaude sanitaire, soit presque autant que la mobilité. Rapportée à la consommation d’agents fossiles dans le pays, la production de chaleur destinée aux surfaces résidentielles se rapproche de 20%. En d’autres termes, elle représente près d’un cinquième des émissions directes de CO2.
Il n’est dès lors pas étonnant que les pouvoirs publics encouragent depuis plusieurs années l’isolation et l’utilisation d’énergies renouvelables. Avec un certain succès: les émissions des ménages liées à l’utilisation d’énergie fossile pour la génération de chaleur (et d’autres usages) ont reculé d’un tiers en trois décennies. Et ce, alors que la population a augmenté de près de 30% sur cette période. Malgré cela, d’importants efforts restent nécessaires dans ce domaine pour atteindre l’objectif de neutralité carbone en 2050.
Ces efforts ne seront pas uniformes. L’âge moyen du bâti et son degré d’isolation, les types de sources de chaleur ou la densité des constructions sont autant de facteurs qui influencent l’impact CO2 du logement. Le Crem, un centre de recherche créé en 1986 à Martigny en collaboration avec l’EPFL, a estimé l’empreinte carbone de chacune des 300 communes vaudoises. Ce premier aperçu montre ainsi une situation contrastée. Si certaines communes vaudoises émettent un peu moins de 10 kg de CO2 par m2 de surface chauffée, le chiffre s'élève à plus de 30 kg dans d’autres.
Le modèle utilisé par le centre de recherche montre notamment que les villas de construction contemporaine affichent des besoins en chaleur par m2 qui sont 15% plus élevés qu’une habitation collective de trois logements et plus. Dans le cas d’une villa ancienne, l’écart peut grimper jusqu’à 150%. Avec des chauffages à énergies fossiles, l'impact carbone d’une villa et celui d’un locatif diffèrent d’autant.
Cela met en évidence l’effet de la densité du bâti sur les émissions de CO2. Dans le cas d’un locatif, les logements ont des voisins en dessus et en dessous, souvent aussi à droite, à gauche ou les deux. La densité réduit ainsi nettement les surfaces à isoler et les déperditions de chaleur par rapport à la surface utile. Dans une villa, les quatre murs et le toit sont des sources de pertes thermiques.
À côté de ces besoins en chaleur, il est nécessaire que le bâti soit accessible et raccordé, notamment en eau et en électricité. Bien que ces équipements disposent d’une empreinte carbone forte, ne serait-ce que l’énergie grise consommée pour les aménager, ils n’ont pas été intégrés à la présente étude. Mais dans ce cas aussi, l’impact du raccordement de plusieurs logements d’un locatif rapporté à sa surface utile reste plus favorable.
L’isolation d’un bâtiment permet de limiter les déperditions thermiques, principalement en hiver. Un bâtiment neuf conforme aux exigences du standard MINERGIE consomme environ cinq fois moins d’énergie qu’un bâtiment standard du 20e siècle. L’orientation, l’exploitation des apports solaires passifs (vitrage), la limitation des parties excavées et la densité permettent de réduire la consommation.
De ce point de vue, l’âge du bâtiment est un facteur clé. Non que les déperditions de chaleur augmentent drastiquement avec le temps et l’usure, ce sont surtout les exigences en matière d’isolation thermique qui ont fortement évolué depuis les années 1970. Ainsi, dans la Loi vaudoise sur l’énergie, le calcul des besoins de chaleur pour le chauffage se réfère à la norme 380 de la Société des ingénieurs et des architectes (SIA 380) et les valeurs limites correspondent globalement au niveau d’exigence du standard MINERGIE pour l’enveloppe du bâtiment.
Ce constat est confirmé par les simulations et résultats du Crem. La consommation d’énergie en fonction de l’année de construction affiche une nette réduction depuis les années 1970, pour atteindre un plateau au début du 21e siècle.
Selon les données de Statistique Vaud, environ un logement sur cinq a été construit après l'an 2000, soit avec une efficience thermique conforme au standard actuel. On constate que, parmi les dix communes comptant le plus de logements, Nyon est la seule dont la part de logements réalisés au 21e siècle est supérieure à la moyenne cantonale (27,4%).
Les neuf autres communes, toutes situées dans des agglomérations, affichent des parts inférieures. Il s’agit de cinq communes de l’agglomération Lausanne-Morges
(Lausanne 11,2%, Renens 17,1%, Pully 14,7%, Morges 15,2% et Prilly 11,4%), de trois communes de l’agglomération Rivelac (Montreux 11,4%, Vevey 17,5% et La Tour-de-Peilz 15,3%) et de la commune principale de l’agglomération yverdonnoise (AggloY, Yverdon-les-Bains 17,5%).
On distingue généralement la part d’énergie dévolue à l’eau chaude sanitaire de celle du chauffage. Dans un bâtiment efficient d’un point de vue énergétique, la température de l’eau de chauffage est beaucoup plus basse que celle de l’eau chaude sanitaire, ce qui permet de diversifier la production
de chaleur. L’usage des énergies renouvelables est souhaité, notamment les capteurs solaires thermiques et photovoltaïques, les chaudières à pellets ou le raccordement à un réseau de chauffage à distance. S’agissant des pompes à chaleur, si une partie de l’énergie provient du réseau électrique, la principale source de chaleur est prélevée dans l’environnement, dans le sol pour les pompes à chaleur avec sondes géothermiques ou dans l’air pour les pompes à chaleur air-eau.
Les exigences en matière d’installations techniques du bâtiment sont aussi régies par la Loi vaudoise sur l’énergie. Sauf exception, en matière de chauffage, la part de chaleur générée dans une construction neuve est limitée à 80% pour une installation au gaz et à 60% pour une installation au mazout ou au charbon. Pour de nouveaux équipements, le recours aux énergies renouvelables est exigé, avec une part minimale de 30% pour les besoins en eau chaude sanitaire. Ces exigences se fondent sur la norme 384 de la Société des ingénieurs et des architectes (SIA 384).
Les données du Crem montrent assez clairement une corrélation entre l’empreinte carbone (émissions de CO2/m2 de surface chauffée) par commune et la part des surfaces chauffées au mazout et au gaz. Plus la part des surfaces chauffées aux combustibles fossiles est importante, plus les émissions de CO2 sont conséquentes. Dans l’optique d’une réduction de l’empreinte carbone, il convient de se rappeler qu’une chaudière a une durée de vie plus courte que d’autres éléments de construction, un coût de remplacement plus bas et un meilleur potentiel de réduction du bilan carbone en cas de substitution par une solution durable. En effet, pour assainir énergétiquement une enveloppe, il est nécessaire de remplacer l’isolation, tant en façade qu’en toiture, ainsi que les fenêtres. Quant à l’amélioration de la densité d’un immeuble, à moins d’une extension ou d’une surélévation, elle passe généralement par une démolition et une reconstruction.
Pour un propriétaire qui souhaite réduire les émissions de CO2 de son bien immobilier. Le point de départ est bien souvent un audit CECB+, soit un examen de la performance énergétique (Certificat énergétique cantonal des bâtiments ou CECB) accompagné par des scénarios de rénovations possibles (cf. https://www.cecb.ch/).
Si l’analyse effectuée par le Crem montre de façon claire que les émissions de CO2 dépendent fortement du type de production de chaleur, avant de remplacer son chauffage, il est nécessaire d’analyser la situation en fonction des caractéristiques et de la situation du bâtiment. De celles-ci dépendent les options possibles: raccordement à un chauffage à distance, possibilité de forage - notamment pour l’installation d’une pompe à chaleur avec sondes géothermiques -, valeurs limites d’émissions pour l’installation d’un chauffage au bois, qualité d’exposition de la toiture pour l’installation de panneaux photovoltaïques ou solaires thermiques, etc. Enfin, la conception de l’immeuble peut également orienter le type de production de chaleur: certaines distributions des logements nécessitent une production avec des températures élevées.
Restent les questions liées au budget. S’agissant de travaux améliorant l’efficience énergétique, des subventions, voire des bonus en termes de financement peuvent être obtenus. Notons que les subventions allouées pour remplacer un chauffage au mazout, au gaz ou électrique par une pompe à chaleur ne sont accordées qu’à partir d’une certaine qualité thermique de l’enveloppe (minimum E du CECB). De plus, les coûts générés par l’assainissement d’un logement sont fiscalement déductibles.
L’analyse du Crem porte sur 139 010 bâtiments résidentiels ou à usage d’habitation dans le canton de Vaud, qui totalisent environ 428 000 logements. L’étude distingue les villas comprenant un logement, des bâtiments de deux, respectivement trois logements et plus. Le modèle d’estimation de l’impact carbone estime la consommation de chaleur des bâtiments à partir de différentes variables, dont notamment la catégorie du bâtiment.
Ce modèle est calibré sur des mesures et simulations réalisées récemment par le centre de recherche pour des communes chablaisiennes et valaisannes. Les résultats sont validés à partir de données dérivées des deux principales villes du canton de Vaud, à savoir Yverdon-les-Bains et Lausanne.