Rapprocher l’œil de l’expert de celui du patient, c’est l’objectif de DermoSafe. Cette société propose un service d’analyse des photos des lésions, qui sont réalisées via son outil, DermoClic.

Entreprises 24 octobre 2016

DermoSafe, faciliter le dépistage des cancers de la peau

Une solution simple et accessible pour évaluer la dangerosité d’une lésion cutanée ou d’un grain de beauté? C’est chose faite avec DermoSafe, start-up qui propose à la fois un outil de détection et un service d’analyse. Explications.

Le point de départ de DermoSafe? «Tout a démarré lorsque j’ai aperçu une lésion bizarre sur le cou de ma fille», explique Philippe Held, fondateur de la start-up basée à l’EPFL. S’agit-il d’un mélanome? Le père de famille réagit comme le fait tout un chacun: recherches sur Internet, prise de rendez-vous avec un médecin, un dermatologue... Il constate que, pour avoir une réponse immédiate, les délais d’attente et les frais sont très élevés. D’autre part, impossible de procéder autrement, puisque les outils de télémédecine existants ne permettaient pas de produire des images de qualité.

Emerge alors l’idée d’un outil qui pourrait «rapprocher l’œil de l’expert du patient». L’ingénieur de formation échange avec des dermatologues, s’entoure de spécialistes. Fin 2012, un prototype de dermatoscope est à peine élaboré qu’il remporte déjà un prix, l’Axa Innovation Award, la première d’une longue série de récompenses.

Créer une solution simple d’utilisation

Pointer, puis cliquer: ce sont les deux gestes à faire pour utiliser le ‘DermoClic’, petit outil qui permet de photographier les grains de beauté paraissant suspects. Un jeu d’enfant. Les clichés ont l’avantage d’offrir une vision de la peau très en détail et en profondeur et surtout d’être standardisés: quel que soit l’utilisateur, le résultat est le même. Philippe Held a déposé des brevets en Suisse, mais n’a pas poursuivi cette démarche à l’international. «C’est très coûteux et cela offre peu de garanties. Mon but était plutôt de proposer rapidement l’outil sur le marché». DermoSafe obtient dès 2013 un prêt de 100 000 francs de la Fondation pour l’Innovation Technologique pour développer l’objet et faire ses premiers tests cliniques.

Offrir une solution complète 

«Dès le départ, nous voulions offrir une solution complète: un produit, une plateforme d’analyse et une équipe de spécialistes pour lire les images», explique Philippe Held. L’idée étant que 48h après la prise et l’envoi d’une photo à DermoSafe, un avis et un conseil professionnel puissent être donnés. Démocratiser la dermoscopie pourrait faciliter les détections précoces de cancers ou lésions suspectes. «L’objectif c’est d’équiper le milieu médical pour que celui-ci encourage les détections, puis réoriente les patients vers un dermatologue, si besoin est». DermoSafe offre en tout cas une solution peu coûteuse. «Pour un cabinet médical, notre système revient à moins de 600 francs, et moins de 200 francs de licence annuelle pour la plateforme. Un appareil de dermoscopie digitale destiné aux centres spécialisés, permettant bien sûr d’autres examens, se chiffre lui à plusieurs dizaines de milliers de francs.» 

Intérêt du grand public

La start-up emploie aujourd’hui trois personnes à plein temps et plusieurs spécialistes pour l’analyse. Elle bénéficie du soutien du professeur Giuseppe Argenziano, qui fait référence internationale dans le domaine. Elle compte une dizaine d’utilisateurs professionnels réguliers; 15 000 lésions ont déjà été analysées. Des séances de détection en pharmacie, en piscine ont montré l’intérêt du grand public et constaté que 70% n’avait jamais effectué de contrôle chez un dermatologue. «Nous nous donnons deux à trois ans pour grandir. Notre objectif est d’attendre plusieurs milliers d’analyses par mois et de commercialiser la solution en Suisse et en Europe, et certainement aux Etats-Unis dans un second temps», explique Philippe Held. Le tour de financement de plus de 500 000 francs bouclé cet été a donné un coup d’accélérateur à cette phase d’expansion.

La FIT a comme objectif d’apporter un soutien au développement de projets technologiques innovants, ses aides sont conditionnées à une collaboration avec une Haute Ecole de Suisse occidentale. La BCV est aux côtés de la Fondation depuis ses débuts. En 2013, la contribution annuelle de la Banque est passée de 50 000 à 500 000 francs; une somme qui sera renouvelée pendant dix ans, afin de permettre à la FIT d’élargir ses soutiens.

 

Camille Andres, rédactrice, pour la BCV