La Russie a, par exemple, réduit ses réserves en dollars en remplaçant la monnaie américaine par des euros et des roubles.
Emmenés par la Russie et la Chine, des états cherchent à moins dépendre des États-Unis et de sa monnaie.
Depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale le dollar américain joue le rôle de monnaie de réserve mondiale. De Gaulle qualifiera cette situation de «privilège exorbitant de l’Amérique».
Ce privilège est de plus en plus remis en question depuis l’investiture de Donald Trump à la Maison Blanche et sa propension à menacer les autres états en s’appuyant sur la puissance économique américaine.
Certains états ont considéré leur dépendance au dollar comme étant un problème grandissant. Ils ont alors commencé à s’intéresser de près aux alternatives leur permettant de faire du commerce sans être dépendant de la devise américaine et de facto des sanctions à leurs égards. Dans un monde financier globalisé, faire des affaires dans une autre monnaie que le dollar s’avère être plus compliqué que prévu.
Les premiers à avoir réagi sont la Chine et la Russie, qui sont notamment visés par les États-Unis: la Chine en pleine guerre commerciale et la Russie sujette à de multiples sanctions depuis l’annexion de la Crimée en 2014. Ces deux pays ont mis en place un hub commercial afin de pouvoir faire des transactions entre eux, soit en roubles soit en yuans. Le problème majeur qu’ils rencontrent est le fait que le yuan n’est, en raison de sa structure, pas encore éligible au statut de réserve.
La Russie a mis en place une stratégie de sortie du dollar qui a fait fondre ses réserves de billets verts de plus de deux-tiers. Elle les a remplacés essentiellement par des euros et des roubles. Les principaux partenaires commerciaux de la Russie ont déjà accepté de faire des transactions dans ces monnaies. Par exemple, les trois-quarts des transactions avec l’Inde sont effectués en roubles, selon Bloomberg.
À la suite du retrait unilatéral des États-Unis de l’accord sur le nucléaire iranien, l’Europe a décidé de mettre en place un véhicule commercial qui lui permettrait de pouvoir continuer à faire des affaires avec l’Iran en euros, sans être bloquée par les sanctions américaines.
Ce véhicule dessiné par la France, l’Allemagne et le Royaume-Uni, est appelé «Instex» (Instrument in Support of Trade Exchanges). Pour le moment, il fonctionne sur un système de troc, il faudra donc deux transactions, là où il n’en fallait qu’une auparavant.
Les États-Unis ont peu goûté à cette fronde européenne, et ont rappelé que les entreprises qui utiliseraient ce véhicule seraient empêchées de faire du commerce sur le sol américain. À ce jour, quasiment aucune entreprise européenne n’a utilisé cette facilité, car le manque à gagner sur sol américain est trop important face au chiffre d’affaires potentiel en Iran, par exemple.
Mais l’important réside dans la dynamique mise en place par tous les états, alliés ou non, des États-Unis. Elle devrait se consolider avec le temps, car la plupart d’entre eux ne veulent plus être entièrement dépendants des États-Unis et de sa monnaie.
Publié dans le commentaire hebdomadaire "Matinale Express - Actions" de la salle des marchés de la BCV, le 6 août 2019