La moisson de dividendes 2018 s’est révélée exceptionnelle.
Les investisseurs en quête de revenus réguliers peuvent jubiler. La moisson de dividendes 2018 s’est révélée exceptionnelle. Les entreprises ont reversé l’an dernier l’équivalent de USD 1 370 milliards à leurs actionnaires, selon l’étude annuelle de la société de gestion Janus Henderson. Leur contribution s’inscrit en hausse de 9,3% par rapport à 2017. Et de 8,5% corrigé des effets exceptionnels, comme les dividendes extraordinaires ou les effets de change. Jamais les sociétés ne s’étaient montrées aussi généreuses.
Les montants alloués aux actionnaires témoignent d’une conjoncture solide et de la bonne santé des entreprises. Plusieurs secteurs ont pu normaliser leur politique de versements après des années difficiles, notamment les banques, les entreprises pétrolières ou encore l’industrie minière. Les sociétés technologiques aux modèles d’affaires matures adoptent de plus en plus une culture de distribution et contribuent à ce bon millésime. Enfin, la réforme de l’imposition des sociétés aux États-Unis a eu une incidence positive même si les entreprises américaines ont aussi utilisé une partie du bonus fiscal pour racheter leurs propres actions (lire ci-dessous).
En 2018, la Suisse a fait bonne figure avec notamment Novartis et Nestlé qui se sont classés dans le top 20 des principaux payeurs de dividendes au monde. Selon Janus Henderson, les entreprises helvétiques ont versé l’an dernier l’équivalent de USD 40 milliards à leurs actionnaires, en légère progression sur un an, mais en hausse de 20% sur cinq ans. Novartis, Roche et Nestlé y ont contribué pour moitié. Ces sociétés mènent des politiques de redistribution exemplaires, encouragées dans cette voie par la pression croissante exercée par les investisseurs activistes. Les trois poids lourds de la bourse suisse parviennent à augmenter chaque année la contribution aux actionnaires, comme en témoigne Novartis qui versait un dividende de CHF 0,5 par action lors de sa création en 1996 et qui a versé CHF 2,8 l’an dernier.
Pour un investisseur exposé au marché suisse, les dividendes représentent bien davantage qu’une poire pour la soif. Car quand ceux-ci sont systématiquement réinvestis, ils apportent une contribution essentielle à la performance. On peut s’en persuader en comparant la performance des indices boursiers dividendes réinvestis et hors dividendes. Depuis 2009, le différentiel de rendement annualisé moyen est, par exemple, de plus de 3% sur le Swiss performance Index (SPI) (voir graphique), dont la version incluant les dividendes vient d’établir un nouveau record à plus de 11 000 points. Sur une décennie, les dividendes réinvestis ont ainsi apporté environ 45% du rendement d’un investissement dans l’indice le plus représentatif de la cote helvétique.
Plus la période est longue, plus ce que d’aucuns appellent «la magie des intérêts composés» (lire ci-dessous) opère. Le Swiss Market Index (SMI), qui regroupe les grandes capitalisations suisses, vaut aujourd’hui quelque 9 400 points contre près de 19 400 points pour le SMIC, sa version avec dividendes, qui a atteint son plus haut niveau fin février. Le réinvestissement systématique des produits de la distribution a ainsi assuré plus de la moitié de la progression de l’indice depuis son lancement à 1 500 points le 30 juin 1988.
Les dividendes mondiaux devraient poursuivre leur progression cette année. La majorité des entreprises ont publié récemment leurs résultats 2018 qui ressortent globalement au-dessus des attentes du marché. Les sociétés devraient donc être en mesure de distribuer de nouveaux montants records en 2019 malgré la maturité du cycle économique. Janus Henderson anticipe une hausse de 3,3% des dividendes mondiaux à USD 1 414 milliards en 2019, ce qui équivaut à USD 700 milliards de plus qu’il y a 10 ans.
L’intérêt pour les entreprises capables de servir des dividendes élevés ne date pas d’hier. Les titres de ces sociétés sont depuis toujours prisés par les investisseurs en actions qui ont besoin de rentrées d’argent régulières. Mais depuis une décennie, faute de rendements décents sur les marchés obligataires, certains investisseurs conservateurs se sont résignés à prendre davantage de risques en s’exposant à ce segment du marché des actions.
Les actions à haut dividende sont aussi appréciées pour leurs vertus stabilisatrices dans un portefeuille diversifié. Les entreprises capables de redistribuer de façon durable une part importante de leurs bénéfices sont généralement des entités qui présentent des bilans financiers solides et des perspectives de développement aussi prudentes que lisibles pour l’investisseur. De ce fait, elles sont généralement moins sujettes à la volatilité que les sociétés de croissance et peuvent jouer un rôle d’amortisseur lors des phases de stress des marchés.
Mais gare à toute déception! Le dividende tient un rôle de vigie sur la santé financière d’une entreprise. Et il a la valeur d’un contrat de confiance entre l’actionnaire et la société. Si celle-ci revoit à la baisse sa politique de distribution, elle sera invariablement sanctionnée en bourse, et généralement de manière très sévère.
En 2018, les entreprises américaines ont versé USD 468,9 milliards de dividendes. Mais elles ont aussi racheté leurs propres actions pour un montant de USD 1 038 milliards, pulvérisant le record de USD 650 milliards établi en 2007. Ce procédé constitue une autre manière pour une entreprise de rétribuer ses actionnaires.
Ce chiffre impressionnant s’explique naturellement par la réforme fiscale américaine qui a non seulement fait exploser les marges bénéficiaires des entreprises l’an dernier, mais qui a aussi poussé celles-ci à rapatrier une partie de leur montagne de cash longtemps parquée à l’étranger. Une frange de ces liquidités a été restituée aux investisseurs à travers les programmes de «share buyback».
Traditionnellement, les rachats d’actions sont des stratégies plus courues aux États-Unis qu’en Europe. L’explication de cette différence tient essentiellement à des raisons fiscales. Les rachats d’actions génèrent principalement des gains en capitaux qui sont faiblement fiscalisés aux États-Unis, contrairement aux dividendes qui entrent dans l’impôt sur le revenu et qui sont lourdement taxés. La préférence des entreprises américaines pour le «share buyback» se lit en partie dans le «payout ratio» (lire ci-dessous) de l’indice S&P qui s’élevait à seulement 45,5%, contre plus de 70% pour le SMI.
Autre avantage d’un rachat d’actions par rapport au versement d’un dividende: le premier ne fait pas baisser le cours de bourse contrairement au second. En rachetant puis en détruisant des titres en circulation, l’entreprise fait monter la valeur unitaire du titre en assurant à ses détenteurs une part plus grande de l’entreprise, et donc une restitution plus importante de ses bénéfices. À contrario, le versement d’un dividende pèse sur le prix d’une action, car l’opération se traduit par une sortie du cash, et donc une diminution de la valeur de l’entreprise pour un nombre d’actions qui, de son côté, n’a pas varié.
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