Un bilan qui a explosé, mais qui a été, depuis, revu à la baisse.
Mars 2020, le coronavirus bat son plein. Les plus grandes économies mondiales, quant à elles, commencent à battre de l’aile après l’annonce du confinement.
Les marchés décrochent subitement, plus particulièrement celui des États-Unis, et la Réserve Fédérale américaine (Fed) promet de «tout faire» pour stabiliser le marché et garder suffisamment de liquidités.
Le premier pas fut l’abaissement drastique du taux de référence, passant de 1,25% à 0,25%, afin de garantir la liquidité des marchés. La Fed commence alors son plan de rachat de dette, un vaste programme dans lequel, elle achète non seulement les bons du trésor, mais aussi les obligations dites investment grade ainsi que les high yield.
Les obligations en dollars américains font une envolée et une frénésie d’achat s’ensuit, car le langage de la Fed donne une quasi-garantie de performance dans les investissements obligataires. Le niveau des obligations remonte presque à celui précédent le choc de mars.
Juillet 2020, la performance à la hausse des obligations semble s’essouffler. Les investisseurs assumant le fait que la Fed continuera à racheter les obligations risquent une belle désillusion, car la banque centrale ne voit pas les choses de cette manière.
Elle a une mission qui est différente de celle qu’imaginent la plupart des investisseurs. Après la chute des bourses au mois de mars, la Fed a décidé d’agir pour soutenir l’économie, son bilan a explosé, affichant une hausse de USD 3 000 milliards de mars à la mi-juin, mais a été réduit depuis en repassant sous la barre des USD 7 000 milliards.
Lorsque la Fed annonce vouloir «tout faire pour aider l’économie», elle sous-entend qu’elle va utiliser tous les moyens à sa disposition – et ces moyens sont colossaux – pour que les marchés restent ordonnés et liquides. Mais, une fois cette mission accomplie, elle n’a plus aucune raison de continuer à injecter de l’argent dans l’économie, sous quelque forme que ce soit.
Cela explique le ralentissement, si ce n’est la stagnation, des rendements des obligations en dollars américains, qu’elles soient investment grade ou high yield.
La Fed pourrait désormais, par exemple, uniquement se concentrer sur le contrôle de la courbe des taux, de la même façon que le fait l’Australie ou le Royaume-Uni. Mais cela ne fera pas ou peu bouger les obligations. Les investisseurs doivent donc aujourd’hui bien analyser leurs positions et commencer à faire un tri sélectif entre celles qui ont performé uniquement grâce à l’action de la Fed et les autres basées sur les fondamentaux des sociétés. Si cela n’est pas fait rapidement, un revers pourrait se produire et effacer toute la performance acquise jusqu’à aujourd’hui.
Par Philippe Waro, BCV
Publié dans le commentaire hebdomadaire "Matinale Express - Actions étrangères" de la salle des marchés de la BCV le 21 juillet 2020