Le PIB suisse a reculé de 3% l’an dernier, la pire contraction depuis plus de quarante ans, mais une contraction moindre que celle des États-Unis (-3,6%), et qui demeure somme toute modeste par rapport au plongeon de 7,3% de la zone euro ou de 11,1% de la Grande-Bretagne.
Après avoir vécu sa pire récession depuis 1975, l’économie suisse devrait rebondir de plus de 3% cette année. Un rebond plus important que celui attendu de l’économie européenne. Ce qui n’est pas sans influence sur l’évolution du franc.
2020 restera une année hors norme. Et 2021? Avec quelles conséquences sur l’activité en Suisse et sur un franc qui vient de retoucher la barre des 1,11 contre un euro.
Hors norme, 2020 l’a été par l’ampleur de la pandémie, par ses impacts sanitaires et humains, par la chute de l’activité économique, par l’ampleur des mesures de relance des banques centrales ou de la réactivité des gouvernements pour soutenir l’activité, mais aussi par l’élargissement des inégalités ou de la fracture numérique.
La Suisse n’a pas été épargnée par ce chamboulement mondial. Pour contrecarrer ses effets néfastes, la BNS a rapidement réagi, augmentant fortement ses interventions sur le marché des changes permettant d’éviter un renforcement exagéré du franc. Le gouvernement est aussi sorti de sa réserve, oubliant le frein à l’endettement, pour mettre en place des mesures de soutien, dont l’ampleur dépasse 10% du PIB. Même si certains secteurs économiques souffrent toujours le martyre, la réactivité des autorités a permis de tempérer la contraction de l’activité. Le PIB suisse a ainsi reculé de 3% l’an dernier, la pire contraction depuis plus de quarante ans, mais une contraction moindre que celle des États-Unis (-3,6%), et qui demeure somme toute modeste par rapport au plongeon de 7,3% de la zone euro ou de 11,1% de la Grande-Bretagne.
Les raisons de cette résistance sont connues: l’adaptabilité et la réactivité de nos entreprises, la capacité de nos entreprises exportatrices à s’adapter à un environnement en permanente évolution, des conditions de financement très favorables et une exposition au secteur du tourisme et de la restauration moindre que chez nos voisins européens.
Cette résistance de l’économie suisse, la solidité de la croissance en Chine ou encore la reprise conjoncturelle en «V» aux États-Unis devraient permettre à la Suisse d’afficher une solide reprise ces prochains mois, une croissance bien plus dynamique que chez nos voisins du Vieux Continent. Alors que la croissance du 1er trimestre aura frôlé le terrain positif, l’embellie devrait être bien plus dynamique dès ce printemps. En effet, l’indice des directeurs d’achat manufacturier helvétique flirte avec les 60 points, celui des services est désormais au-dessus des 50 points, le baromètre conjoncturel du KOF a rebondi au-dessus de sa moyenne de long terme, les carnets de commandes se regarnissent, et même les perspectives d’emploi tentent d’amorcer un tournant positif – même s’il est vrai que les derniers chiffres contiennent des éléments saisonniers.
Au vu de ces indicateurs avancés, l’activité industrielle contribuera à la reprise, les exportations également, tout comme les dépenses du gouvernement. Le principal moteur de l’embellie tonique des prochains mois devrait cependant être la consommation des ménages. Malgré une sérieuse détérioration du marché du travail depuis un an (taux de chômage proche de ses plus hauts depuis une décennie), le graduel déconfinement, les campagnes de vaccination ou encore un rattrapage des dépenses de consommation doperont la reprise ces prochains mois. Comparaison n’est pas raison, mais rappelons-nous que la croissance au sortir du premier confinement – qui était certes plus strict qu’actuellement – dépassait les 7%.
Cette solide reprise devrait permettre à l’économie suisse de combler dès cet été le trou récessionniste de 2020 (ce qui a déjà été fait en Chine, le sera prochainement aux États-Unis et devrait avoir lieu l’an prochain dans la zone euro). La progression du PIB pourrait dépasser 3% cette année, soit une reprise du même acabit que celle de 2010, au sortir de la dernière crise financière. En Suisse, comme ailleurs, elle laissera en revanche bien plus de monde sur le carreau, bien plus d’entreprises ne survivront pas et le fossé des inégalités ne sera que plus profond.
Qui dit reprise dynamique de l’activité, dit aussi retour de l’inflation. Si la progression des prix à la consommation s’installe en territoire positif ces prochains mois, parler d’inflation est excessif alors que les salaires ne progresseront guère et que les hausses de prix seront tempérées par un franc ferme, par d’amples capacités de production disponibles ou encore par un taux de chômage élevé qui modérera toute velléité de pressions haussières généralisées sur les salaires.
C’est dans ce contexte de forte reprise, de croissance plus forte que chez nos voisins européens et d’inflation contenue qu’évoluera notre monnaie nationale. Si le franc a été une des devises vedettes de 2020, il n’a pas perdu tous ses atours. Pour qu’il se déprécie régulièrement face à l’euro, il faudrait notamment une hausse des rendements bien plus forte sur les emprunts européens que sur ceux de la Confédération, ce qui semble difficile tant que la BCE continuera d’acheter de la dette sur le marché pour soutenir une économie européenne toujours fébrile.
Article paru dans Allnews, le 18 mars 2021
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