Au-delà de l’impact humain et géosécuritaire, l’invasion de l’Ukraine par l’armée russe engendre d’importants effets économiques dont l’ampleur ne peut encore être précisément évaluée. Si l’interdépendance économique entre la Russie et l’Occident, dont la Suisse, n’est pas systémique, le conflit agit indirectement sur la croissance. Même si un accord intervient, le conflit laissera des traces empêchant un retour rapide à la situation antérieure dans les relations entre Moscou et l’Occident. La perturbation des circuits économiques ajoute par ailleurs aux tensions déjà présentes depuis la pandémie sur les chaînes de production et sur l’offre des biens et services.
Pour l’heure, les mouvements de capitaux et les investissements sont touchés par les sanctions. Les prix du gaz, du pétrole, de certains métaux comme le nickel, du blé ou de l’huile de tournesol explosent en raison du poids de la Russie et de l’Ukraine dans la production mondiale. Des routes commerciales sont interrompues. Les dépenses d’armement s’envolent. Certains secteurs, comme le luxe, voient un marché non négligeable se fermer.
L’impact économique de ce conflit se lit notamment dans les révisions à la baisse de la croissance mondiale. La guerre et ses conséquences accentuent en fait le ralentissement attendu de l’activité après la forte reprise qui a suivi les différentes vagues de la crise sanitaire. La hausse des prix de l’énergie et autres matières premières accroît les pressions inflationnistes sur le pouvoir d’achat des ménages et les bénéfices des entreprises ainsi que sur les politiques monétaires.
En raison de sa proximité du front et de sa dépendance aux hydrocarbures russes, la zone euro ressent davantage les conséquences économiques de la guerre que les États-Unis. L’envolée des prix des matières premières prolonge les tensions inflationnistes et, avec elles, les pressions sur la consommation. La situation peut en outre saper le moral des ménages et des entrepreneurs les poussant à freiner davantage encore leurs dépenses. La Banque centrale européenne (BCE) a ainsi revu ses prévisions de croissance à la baisse. Le PIB de la zone euro devrait progresser en 2022 de 3,7%, contre 4,2% attendu précédemment.
En Suisse, la Banque nationale (BNS) a aussi revu ses prévisions de croissance pour l’économie suisse en mars. Elle s’attend désormais, pour cette année, à une valeur ajoutée en hausse de 2,5% contre 3,5% en décembre. L’éclatement de la guerre s’est en outre lu dans l’évolution de l’euro qui a ponctuellement cassé le seuil de CHF 1 avant de se reprendre légèrement.
Les marchés ont fortement réagi à l’invasion de l’Ukraine par l’armée russe. Ils ont ensuite rebondi au fil de l’actualité, car survendus. Leur évolution dépendra en outre de la normalisation des politiques monétaires et de l’ampleur du ralentissement de l’activité. Ils devraient rester volatils au gré de l’actualité et des mesures des banques centrales. En raison des incertitudes, nous préconisons une pondération en actions proche de neutre dans les portefeuilles.