Se séparer, c'est se laisser une période de réflexion pour pouvoir, par la suite, soit renouer, soit divorcer.
Vous décidez de vous séparer, mais ne souhaitez pas divorcer; en tout cas, pas encore. Le droit suisse prévoit plusieurs formes de séparation, qui auront de potentiels impacts sur votre patrimoine et l'organisation familiale.
Les difficultés dans le couple pouvant être passagères, le droit suisse prévoit des alternatives au divorce, afin de laisser le temps de la réflexion aux époux.
Vous pouvez, d’un commun accord, décider de vivre séparément, sans pour autant porter votre séparation devant une instance judiciaire. Il est cependant recommandé d’établir une convention de séparation sous seing privé pouvant être validée par le juge.
Lors d’une séparation de fait, tous les effets découlant du lien conjugal sont maintenus. Cette forme de séparation n’a pas d’effet sur le régime matrimonial ni sur l’autorité parentale.
Néanmoins, il est nécessaire d’informer de cette séparation de fait le contrôle des habitants, les caisses de compensation, les assurances, etc. Le pouvoir de représenter l’union conjugale prend fin, sauf envers les tiers non informés. Les conjoints doivent remplir deux déclarations d’impôt distinctes dès le 1er janvier de l’année fiscale de la déclaration de séparation, mais pour cela, certaines conditions doivent être remplies. Je vous invite à consulter un conseiller fiscal ou votre service fiscal cantonal à ce sujet.
Lorsque la séparation se fait d’un commun accord, il est en tout temps possible de l’annuler ou de revoir ses conditions.
Lorsque la séparation de fait est impossible, deux possibilités s’offrent à vous: la séparation de corps ou les mesures protectrices de l’union conjugale. En présence d’enfants mineurs, si vous souhaitez vous séparer et ne pas divorcer, ces dispositions sont à privilégier, car elles nécessitent l’obligation d’organiser la séparation.
Les mesures légales sont prononcées par le juge à la demande de l’un ou des deux époux et ont pour but de conserver les liens du mariage. Elles permettent de régler provisoirement une situation difficile qui peut, par la suite, évoluer tant vers la réconciliation que le divorce. Le mariage n’est pas dissout et les avoirs de prévoyance professionnelle (LPP) ne sont pas partagés. Les conjoints restent héritiers l’un de l’autre et la fiscalité afférente à la succession reste celle d’un couple marié.
La convention règle les effets de la séparation et la requête commune formalise la demande en justice. Les sujets à régler dans le cadre des mesures protectrices de l’union conjugale sont: l’attribution du domicile, les relations avec les enfants mineurs (l’autorité parentale conjointe est la règle depuis 2014), les contributions à l’entretien de l'enfant et du conjoint, le retrait du pouvoir de représenter l’union conjugale et, dans certaines limites et par décision du juge, la liquidation du régime matrimonial.
Les mesures ordonnées prennent fin soit à l’expiration du délai fixé dans le jugement, soit sur requête d’un des époux. Elles peuvent également être renouvelées. En cas de reprise de la vie commune, les mesures prises sont supprimées, sauf celles qui ont trait à la séparation de biens et à la protection des enfants. Si, à l’inverse, la reprise de la vie commune n’est pas envisageable, la séparation de corps ou le divorce sont à envisager.
La séparation de corps peut être demandée conjointement ou unilatéralement. Cette procédure règle les conséquences de la séparation telles que la situation des enfants mineurs, la détermination des contributions d’entretien ou l’attribution du logement familial.
La séparation de corps suspend votre vie commune au même titre qu’un divorce: il n’y plus de domicile commun, ni de possibilité de représenter l’union conjugale. A la différence du divorce, le jugement prononçant la séparation de corps ne dissout pas le lien conjugal: vous conservez le nom acquis par mariage ainsi que les droits successoraux et de prévoyance. Une séparation peut avoir pour conséquence la suppression du plafonnement des rentes AVS/AI. Le droit au partage de la prestation LPP perdure tant que le mariage existe, soit jusqu’à la date du divorce si ce dernier a lieu: les années pendant lesquelles vous êtes en situation de séparation de corps sont assimilées à des années d’union conjugale. Une obligation de solidarité subsiste, vous assumez donc ensemble les frais supplémentaires qu’engendrent deux ménages séparés. Vous demeurez coresponsables des dettes que vous avez contractées durant votre vie commune pour les besoins du ménage. La séparation de corps entraîne de plein droit le régime de la séparation de biens. Si vous étiez mariés sous un autre régime, ce dernier devra être liquidé.
S’agissant des enfants, l’époux auquel ils ne sont pas confiés est privé de la garde. Néanmoins, l’autorité parentale conjointe est fréquemment conservée. Le juge règle les droits et devoirs des père et mère (autorité parentale, garde de l'enfant, relations personnelles, contribution d'entretien, etc.). Le domicile familial est attribué au parent à qui est conférée la garde des enfants ou, en l’absence d’enfant, à l’époux qui justifie d’un intérêt prépondérant. Les conjoints établissent une déclaration fiscale chacun à compter du 1er janvier de l’année de la séparation.
La séparation de corps prend fin si vous vous remettez en ménage commun, lorsque le divorce est prononcé ou si l’un des conjoints décède. En cas de reprise de la vie commune, les mesures relatives aux contributions pécuniaires, à l’attribution du logement et du mobilier de ménage ainsi que les dispositions prises pour les enfants (sous réserve des mesures de protection de l’enfant) prennent fin automatiquement en cas de séparation de biens prononcée par jugement. Restent en vigueur l’avis aux débiteurs et la restriction du pouvoir de disposer ainsi que le retrait du pouvoir de représenter l’union conjugale.
Après deux ans de vie séparée, vous avez la possibilité de demander la séparation de corps ou le divorce de façon unilatérale. Il est alors vivement recommandé de se faire assister d’un conseiller juridique ou d’un avocat.
Publié dans Générations en novembre 2018