Table ronde sur la situation économique et les placements - Fernando Martins da Silva, BCV - Serge Ledermann, 1959 Advisors - Fabrizio Quirighetti, Decalia Asset Management SA
Les banques centrales injectent des sommes colossales. Elles vont peu à peu lever le pied. La phase de transition est délicate, mais bien accompagnée, ont relevé les intervenants des Rendez-vous de la Finance.
Les marchés sont montés très vite, très haut. Et pour cause. «Depuis mi-2020, les banques centrales ont injecté 850 millions de dollars par heure dans le système financier mondial.» C’est par cette statistique-choc que Fernando Martins da Silva (BCV) a planté le décor du débat, décrivant un environnement financier jusqu’ici extraordinairement porteur pour les actifs risqués. En absorbant trois-cinquièmes des montants des emprunts émis par les États, les banques centrales ont par ailleurs grandement facilité la mise en œuvre des plans de relance massifs, a rappelé Fabrizio Quirighetti (Decalia Asset Management). Cette synchronisation des politiques monétaires et budgétaires a fait merveille et explique la hausse des actions mondiales, de l’ordre de 20% depuis le début de l’année. Une progression d’autant plus justifiable qu’elle est inférieure au redressement des bénéfices des entreprises.
Voilà pour la situation aujourd’hui, mais qu’en sera-t-il demain? Le pic de l’activité économique est derrière nous et les investisseurs doivent se projeter dans une dynamique de croissance un peu moins fougueuse, ont reconnu tous les orateurs. Les autorités ne sont plus dans une logique d’urgence et vont peu à peu lever le pied sur leurs mesures d’assistance extraordinaires. Cette phase de transition, qui sera notamment marquée par le recalibrage des programmes d’injections de liquidités des banques centrales, sera certes délicate pour l’économie et les marchés, mais elle ne signera pas la fin des soutiens à l’économie.
En effet, l’engagement des États, qui ont encore une grande capacité d’endettement selon Fabrizio Quirighetti, va rester soutenu ces prochaines années. Pour Serge Ledermann (1959 Advisors), la crise sanitaire offre aux gouvernements une fenêtre d’opportunité unique qu’ils vont exploiter pour investir dans le monde de demain autour de deux axes principaux: la transition vers une économie zéro carbone et l’édification d’une société plus inclusive. Un changement de modèle salutaire, mais coûteux dont la réussite repose sur la capacité des banques centrales à garantir des conditions d’emprunt soutenables.
Sauf dérive inflationniste aux États-Unis ou sortie de route de l’économie chinoise, les investisseurs pourront donc compter durant les prochains mois sur une croissance mondiale en décélération, mais toujours supérieure à son potentiel de long terme, dans un environnement de taux durablement bas. Une configuration qui remet au goût du jour à l’acronyme TINA (there is no alternative), les actifs risqués étant perçus comme la seule source de performance, a constaté Gérard Haeberli, directeur général Private Banking de la BCV, en conclusion du débat.