Les Rendez-vous des Entrepreneurs 2019 se sont notamment arrêtés chez GH SA à Yverdon-les-Bains. Parmi les intervenants, Andreas Diemant, directeur général de la division Entreprises de la BCV, a évoqué les perspectives économiques de l'année en cours.
Cette question complexe était au menu des Rendez-vous des Entrepreneurs 2019. Une manifestation qui permet aux acteurs économiques des différentes régions du canton de s’informer et d’échanger.
D’une salle d’exposition de meubles à une fromagerie, d’un fabricant de connecteurs électroniques à des fournisseurs de solutions pour chantiers petits et grands. Cinq cadres différents. Cinq cadres au cœur des entreprises. Les Rendez-vous des Entrepreneurs de la BCV, cuvée 2019, ont à nouveau sillonné le canton à la rencontre des acteurs économiques de chaque région. Entre conférences et croissants, les participants ont ainsi pu échanger, mais aussi s’informer sur différents thèmes d’actualités. En exergue cette année, la difficile mesure de la valeur d’une entreprise et les solutions pour se prémunir contre les mouvements de taux.
Si l’intérêt pour le partage d’expériences reste tout aussi vif d’année en année, les conditions dans lesquelles ces rencontres se déroulent, elles, changent. Ainsi en ce début 2019, les points d’interrogation sur la situation économique dans le monde, en Suisse et dans le canton de Vaud étaient plus nombreux que l’an dernier. Les perspectives économiques devraient rester encore relativement favorables cette année, mais pourraient se dégrader quelque peu l’an prochain, a souligné en préambule Andreas Diemant, directeur général de la division Entreprises. Aux soubresauts conjoncturels s’ajoutent les changements structurels qui demandent à chaque entrepreneur de s’adapter, notamment aux exigences liées à la digitalisation.
Cet environnement, dans lequel évoluent des forces parfois antagonistes, exige des processus de gestion des risques toujours plus complexes et pointus: de leur définition à leur suivi en passant par leur mesure et les stratégies à développer pour s’en protéger. L’entrepreneur doit ainsi établir des marches à suivre pour la prise de décisions et répartir les responsabilités afin de ne pas se laisser surprendre par un événement impromptu. Il doit régulièrement prendre du recul, se poser les questions qui dérangent afin d’assurer la viabilité de son entreprise. Que ce soit par rapport à sa propriété, à sa structure managériale ou aux conditions de marchés. Est-ce qu’un mauvais exercice peut mettre en péril la viabilité de mon entreprise? Quelle influence un événement macroéconomique pourrait avoir sur la valeur de mon entreprise? À partir de quel cours de l’euro mes affaires sont en danger? Si les taux remontent, pourrais-je procéder aux investissements prévus?
Cette réflexion stratégique ne permet pas seulement de mieux appréhender le quotidien, mais aussi de penser à demain, voire après-demain. Et notamment à la transmission de son entreprise. Un processus parfois long et empreint d’émotions qui peut être facilité s’il est préparé très en amont et entouré des personnes adéquates.
S’il est un point critique dans ce processus de changement de propriétaire, c’est bien celui de la valorisation de l’entreprise. Pascale Boyer Barresi, responsable en transmission d’entreprises chez PwC, a rappelé l’importance du contexte dans lequel est évaluée toute société. Cette estimation peut se faire dans le cadre d’un reporting financier, d’une analyse juridique, au travers des outils de gestion ou au moment même de la transaction. Autant dire que dans l’une ou l’autre des situations, la valeur émotionnelle ne sera pas la même. Une remarque que l’on peut étendre au rationnel ou à la valeur de marché. Prenez une entreprise exportatrice en zone euro, l’acheteur n’aurait guère apprécié l’acquérir en mars 2015 sur une estimation de décembre 2014.
Le processus d’évaluation passe aussi par ce que contient le panier de passage de témoin. L’immobilier? Des bénéfices thésaurisés? Des actifs non-opérationnels? «La séparation claire des activités opérationnelles permet d’éviter des points de négociation difficiles», a résumé Nicolas Corod, responsable en transmission d’entreprises à la BCV. Se pose ensuite la question du choix de la méthode la plus appropriée pour évaluer ces actifs. Doit-elle être basée sur les chiffres passés ou ceux à venir? «Les méthodes axées sur les bénéfices sont à privilégier tant en termes de financement bancaire que dans le contexte d’une transaction», a précisé Pascale Boyer Barresi. L’analyse globale du fonctionnement de l’entreprise conduit à l’identification de facteurs qualitatifs et quantitatifs qui peuvent avoir une influence positive ou négative sur sa valeur. L’entreprise vient de procéder à des investissements stratégiques, mais dépend principalement d’un grand client. Si le premier peut facilement être mesuré, comment évaluer le second?
Enfin, il y a l’acheteur. L’appréciation de la valeur de l’entreprise ne sera pas la même si le repreneur provient du cercle familial ou s’il est un fonds d’investissement étranger. Le premier cas pourrait induire une certaine décote, le second une prime. Globalement, lors de la transmission d’une entreprise à un enfant ou à un groupe d’employés, le prix pourrait être touché par une décote de 20% à 30% suivant les cas.
Plus que jamais l’une des célèbres petites phrases de Warren Buffett revient à l’esprit: «le prix, c’est ce que l’on paie, la valeur c’est ce que l’on obtient». Au final, «procéder à cette évaluation permet de dresser un diagnostic de la santé de l’entreprise. D’où la nécessité de lancer le processus le plus en amont possible», insiste Nicolas Corod. Alors peut-être que l’entreprise ne sera pas vendue demain. Mais «cette démarche constitue une base solide pour les réflexions stratégiques regardant tant l’entreprise que le patrimoine de ses dirigeants», conclut le responsable en transmission d’entreprises à la BCV.
Anne Gaudard, rédactrice BCV