S'il reste lointain, le retour de l'inflation invite à une réflexion stratégique sur ses investissements, sur son endettement, sur la gestion de ses capitaux propres ou externes, du moins pour les entreprises qui le peuvent en cette période difficile.
La reprise économique - plus ou moins vive selon les régions et les branches - a des conséquences, comme l'inflation ou la hausse des taux. Bien qu'encore lointains, ces éléments doivent être pris en compte dans les scénarios de gestion d'une entreprise.
L’inflation fait son retour dans le paysage économique. La hausse des prix concerne aujourd’hui essentiellement les États-Unis. S’il reste lointain, ce changement de paradigme invite à une réflexion stratégique sur ses investissements, sur son endettement, sur la gestion de ses capitaux propres ou externes, du moins pour les entreprises qui le peuvent en cette période difficile.
Que signifie ce retour? Avant tout, une bonne nouvelle: la reprise est vigoureuse, même si inégale, aux États-Unis. Elle bénéficie d’un soutien extraordinaire, chiffré en milliers de milliards de dollars, tant du gouvernement fédéral que de la Banque centrale, la Fed. Si ce dynamisme pousse les prix à la hausse, la progression devrait cependant peu à peu être atténuée par la fin de l’effet de rattrapage actuel. En Europe, les prix se redressent aussi, mais à des niveaux bas. Quant à la Suisse, elle devrait enregistrer cette année le retour de l’inflation en territoire positif. La BNS s’attend à un taux de 0,2% en 2021 et de 0,4% en 2022, soit loin de ses objectifs de 2%.
Conséquence de cette bonne santé de l’économie américaine, les courbes de taux bougent. Sensibles à la croissance de l’économie et aux anticipations d’inflation, les taux longs se sont redressés aux États-Unis sous l’œil vigilant de la Fed. Dans la foulée, de ce côté-ci de l’Atlantique, ils frémissent, mais à des niveaux qui restent bas, voire négatifs – notamment en Suisse.
Côté taux courts, en revanche, la situation reste stable. Les banques centrales, Fed comprise, maintiennent leur politique accommodante et n’envisagent pas de relever leurs taux directeurs cette année ni l’an prochain. Ainsi, pour les entreprises, notamment celles en difficultés depuis un an, la donne ne change pas en matière du coût de l’argent à brève échéance, en matière de gestion des liquidités, de fonds de roulement. Cette stabilité envoie aussi un signal à celles et ceux qui ont fait appel aux crédits COVID-19. Pour rappel, le taux d’intérêt de ces prêts garantis par la Confédération reste à zéro cette année. Quant au remboursement, il s’étale sur huit ans, comme en a décidé le Parlement.
Si le long cycle de taux bas se poursuit actuellement, le changement de paradigme aux États-Unis incite à prendre un peu de recul. Ce peut être le bon moment pour engager un dialogue avec son partenaire bancaire sur la situation de son entreprise, pour prendre connaissance des perspectives économiques, pour s’appuyer sur ses conseils pour les éventuelles prochaines étapes de son développement. Les conditions sont-elles propices à des investissements? Si oui, sur quelle durée faut-il les prévoir? Est-il nécessaire d’envisager une protection contre le risque d’une hausse des taux longs?
D’ailleurs, le changement de paradigme en cours rappelle l’importance de la gestion de son portefeuille de dettes – une remarque qui vaut aussi pour les investisseurs immobiliers. Les échéances sont-elles suffisamment réparties dans le temps? Un bon panachage permet en effet d’atténuer les effets financiers de toute incurvation de la courbe des taux. Des outils existent pour faciliter l’exercice et se protéger en amont du mouvement.
La différence de rythme entre la reprise en Suisse, en Europe, aux États-Unis ou en Chine tend également à accroître les écarts de rendement entre les monnaies. Une plus grande volatilité du marché des changes ajoute un risque à la conduite d’une entreprise dans une période particulièrement exigeante. C’est notamment vrai pour les plus petites entités. Or, comme pour les taux, des outils très simples et standardisés permettent désormais de se couvrir, même si les flux d’entrées ou de sorties de devises ne peuvent être datés précisément.
Anticiper – tant que faire se peut – permet de se préserver une marge de réaction dans un environnement économique qui reste soumis à l’évolution de la crise sanitaire.
Article paru dans PME Magazine, mai 2021