«Il y a toujours plus de conseillers robots et autres offres de gestion de patrimoine digitale. Quels sont leurs avantages ou inconvénients?»
Marie, Vevey
Les conseillers robots, ou robo advisors en anglais, gagnent en notoriété. Toujours plus de personnes leur confient une partie de leur patrimoine, quel que soit leur âge ou le montant dont elles disposent. Une tendance affirmée aux Etats-Unis qui se développe aussi en Europe et en Suisse. S’ils portent le nom de robots, ils n’ont cependant rien d’humanoïde, ce sont des algorithmes qui guident des plateformes de services financiers. Ainsi, si vous y regardez de plus près, vous vous trouvez devant de nombreuses offres et presqu’autant de modèles d’affaires dans lesquels votre rôle en tant qu’investisseur diffère fortement. Et desquels vous ne devez pas attendre les mêmes prestations.
La gestion de patrimoine en ligne s’est notamment développée au soir de la crise financière de 2008. Au début, l’offre provenait essentiellement de start-up avec un message principal: ce canal d’investissement permet d’éviter le biais comportemental qui a accru les effets de la crise. En d’autres termes, finis les réactions émotionnelles et autres comportements moutonniers. Reste que le cœur du dispositif demeure influencé par l’homme. C’est bien un cerveau humain qui configure l’algorithme qui décide quand acheter et vendre ou toute autre opération. Aujourd’hui, l’écart se réduit entre les banques et ces nouvelles sociétés fintech, comme sont désignées les nouvelles technologies financières. Les uns développant leur offre technologique, les autres devant élargir leur clientèle au-delà des amateurs de nouveautés et autres premiers séduits. De révolution, le robo advisor ressemble davantage à une évolution technologique.
La gestion de patrimoine numérique s’étend en fait du robo advisor à la relation bancaire traditionnelle s’appuyant sur des services digitaux. Un conseiller robot gère un portefeuille selon votre profil de risque et la stratégie adoptée. Une fois les questionnaires initiaux remplis, votre marge de manœuvre est réduite. L’algorithme rééquilibre votre portefeuille au gré des évolutions du marché selon le cadre défini. Vous disposez ainsi de peu, voire pas de conseil. En revanche, vous recevrez des rapports réguliers de votre portefeuille sous forme automatisée et souvent facile à comprendre.
Si vous optez pour un investissement numérique assisté par un conseiller, une partie de la gestion est automatisée – information et autres rapports ainsi que les analyses de base de l’évolution de votre portefeuille –, mais un professionnel de la gestion de fortune est prêt à répondre à vos questions en cas de besoin. Entre ces deux pôles figurent des modèles hybrides avec plus ou moins de conseils. On pourrait aussi ajouter à cette liste d’autres tendances: le social trading, des réseaux sociaux dédiés à l’investissement, ou des plateformes qui s’adressent à une clientèle bien précise (ex: les femmes).
Votre choix va notamment dépendre du rôle que vous voulez jouer et de votre niveau de connaissances financières. Voire des coûts des différentes solutions. Vous pouvez décider de donner les pleins pouvoirs à votre robot une fois votre stratégie définie. Il va calculer l’écart entre la réalité et la situation théorique qu’auraient dû atteindre vos placements selon la politique décidée. S’il est trop grand, il réajuste vos positions dans le cadre des lignes directrices fixées. Les produits utilisés sont souvent limités à certains fonds ou ETF (exchange traded funds), des fonds reproduisant des indices cotés en Bourse. Notamment pour restreindre les coûts de gestion.
Certaines plateformes n’effectuent pas les changements, mais vous avertissent de tout événement pouvant influencer votre portefeuille, à vous ensuite de procéder ou non aux modifications. Le robot ne vous informe pas toujours de quand ou quoi acheter ou vendre, mais il peut élargir votre horizon de placement en vous proposant des secteurs ou titres à la manière de «ceux qui ont investi ici ont aussi investi dans…». Aujourd’hui, l’offre est en pleine évolution et va vers des solutions toujours plus personnalisées.
De fait, les banques et autres instituts financiers utilisent en partie ces outils pour leur politique d’investissement et l’accompagnement de leur clientèle. Le conseiller y ajoute une valeur ajoutée, une approche personnalisée et ciblée qui peut augmenter encore en période de turbulences. Preuve en est la récente secousse provoquée en Bourse par le vote sur la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne. Certes, le robot ne va pas paniquer, mais un conseiller peut mieux vous convaincre de la stratégie à adopter en de telles circonstances au vu de son expérience et de vos objectifs. Un récent rapport d’Ernst&Young insiste sur l’évolution du rôle de conseiller qui devient toujours davantage un «thérapeute financier». Il laisse les tâches automatisables aux robots et se concentre sur la sensibilisation et l’accompagnement de sa clientèle.
Si l’on évoque souvent le terme d’intelligence artificielle, son application reste très limitée dans le domaine bancaire. Il est ainsi difficile de trouver des plateformes qui permettent de répondre à l’ensemble des questions liées à votre planification financière à long terme et à vos projets de vie. Le conseiller dispose d’une vision plus transversale de vos besoins entre aujourd’hui et demain, entre votre envie d’immobilier et vos objectifs de retraite par exemple.
La tendance s’oriente clairement vers une offre plus ou moins digitale ou plus ou moins personnalisée au gré de vos besoins. Sans oublier que, au final, conseiller et robot agissent selon les objectifs que vous vous êtes fixés. Votre décision dépend, elle, du degré de confiance que vous attribuez à l’une ou l’autre des solutions. Qui plus est en période boursière mouvementée. Et n’oubliez pas que les robots ne sont pas plus à même que les hommes à prédire l’évolution des Bourses…
Article paru dans le magazine Générations, septembre 2016