La Suisse a riposté à la décision de Bruxelles en n’autorisant le négoce de titres des entreprises ayant leur siège en Suisse que sur les plateformes de Zurich ou Berne ainsi que les places qualifiées d’équivalentes.
L’Union européenne a mis sa menace à exécution: l’équivalence boursière accordée à la Suisse n’a pas été renouvelée. Á court terme, les conséquences devraient être limitées, mais il est impossible de mesurer les effets à plus longue échéance sur le marché des capitaux et la place financière suisse.
L’Union européenne n’a pas reconduit l’équivalence boursière temporaire accordée à la Suisse. Conséquence: les banques et autres intermédiaires financiers européens ne peuvent plus échanger des titres sur les places boursières suisses. La Suisse a riposté en n’autorisant le négoce de titres des entreprises ayant leur siège en Suisse que sur les plateformes de Zurich ou Berne ainsi que les places qualifiées d’équivalentes. Pour les investisseurs, cette décision ne devrait avoir que peu d’impact à court terme.
Afin d’obtenir la meilleure exécution possible pour ses clients, une banque ou un broker négocie des titres sur différentes bourses et plateformes. Les acteurs du marché échangent ainsi les titres suisses principalement à la bourse de Zurich, mais également sur des plateformes en Europe, notamment à Londres. À la suite de la décision de la Commission européenne, il n’aurait plus été possible pour les intervenants européens de traiter ces actions en Suisse sans la contre-mesure mise en place par le Conseil fédéral.
Comment en est-on arrivé là? Depuis l’introduction de la directive européenne sur les marchés financiers appelée MIFID II, les sociétés d’investissement doivent négocier les actions en Europe ou sur des places ou plateformes de négociation jugées équivalentes par Bruxelles. But de l’opération: protéger l’investisseur en s’assurant que les conditions d’échange, de gouvernance et de transparence soient équivalentes. Pour que les actions européennes puissent être échangées en Suisse, la Bourse suisse a donc dû demander une équivalence. Elle l’avait obtenue à fin 2017 pour un an, car l’Union européenne a lié son obtention définitive à la signature de l’accord-cadre gérant les relations entre la Suisse et l’Union européenne. Un délai de six mois lui avait été accordé à la fin de l’an dernier. Il n’a pas été prolongé, car Bruxelles considère que les négociations n’avancent pas suffisamment vite.
Afin de sauvegarder l’intérêt du marché suisse des capitaux, le Conseil fédéral a paré la décision européenne en élaborant une ordonnance qui impose aux Européens la place suisse – et celles jugées équivalentes – comme seuls lieux de négoce pour les actions suisses. La contre-mesure établit la nécessité pour une plateforme étrangère d’obtenir une autorisation si elle veut que des titres des sociétés ayant leur siège en Suisse puissent y être échangés. Cela signifie ainsi que si un investisseur français veut acheter un titre Swisscom par exemple, il ne pourra pas le faire à Paris ou à Londres, mais devra le traiter sur SIX Swiss Exchange.
La bonne exécution des ordres passés auprès des banques suisses ne sera pas affectée à brève échéance, car la liquidité devrait être assurée par la riposte de Berne. La prolongation de cette situation pourrait en revanche nuire à l’attractivité du marché des capitaux en Suisse à plus longue échéance. Mais il est aujourd’hui difficile de mesurer concrètement l’ampleur du phénomène. Selon les conséquences, l’impact sera particulièrement important pour SIX Swiss Exchange dont près de la moitié du volume d’affaires est assurée par des acteurs européens.
Par Fabien Bruegger, BCV