L’indice Bloomberg a dépassé son seuil symbolique et se situe, comme son homologue américain, à son plus haut depuis deux ans.
Tous les regards sont tournés vers les banques centrales et leur réaction pour lutter contre l'inflation. Dernièrement, l’augmentation record d'inflation, la guerre en Ukraine et les hausses des taux directeurs qui ont suivi ont attiré toute l’attention des investisseurs et de la presse spécialisée.
2022, n'est pas seulement l'année du retour de l'inflation, et enfin des taux positifs en Suisse, c'est aussi le retour de spreads beaucoup plus élevés. Le spread est la prime que les investisseurs exigent pour posséder une obligation d'entreprise au lieu de la référence sans risque, souvent les obligations d’État. Fin juin, un seuil clé a été franchi, il pourrait, selon de nombreux analystes et investisseurs, perturber le flux du crédit. L'indice Bloomberg mesurant le spread des obligations américaines « Investment-grade » a dépassé le seuil symbolique de 150 bps. Il s'agit du niveau le plus élevé depuis deux ans, selon les données compilées par Bloomberg.
Même situation en Europe, où le spread qui retient le plus l'attention des investisseurs et de la BCE, celui de l’écart de rendement entre BTP et BUND, a touché la barre des 240 bps; seulement l’annonce de la BCE de la création d’un outil anti-fragmentation, sans détails précis, a pu effrayer les spéculateurs et ramener le spread européen le plus suivi sur le vieux continent dans la fourchette des 200 bps.
L’indice Bloomberg qui mesure le spread des obligations européennes « Investment-grade » est, comme son homologue américain, à son plus haut depuis 2 ans, et a franchi la barre des 200 points de base.
Les spreads ont été historiquement bas, car les gouvernements ont pris des mesures drastiques au début de la pandémie de Covid, soutenus par les programmes d'achat d'obligations mises en place par les banques centrales. Toutes ces actions ont été primordiales pour maintenir le financement des entreprises et des pays à un niveau historiquement bas. Mais depuis le début de l'année, le retournement des taux, la situation géopolitique et la politique monétaire des principales économies du monde ont provoqué l’écartement des spreads, avec des conséquences très coûteuses pour les pays et les entreprises. Sur le marché des obligations d'entreprises, même les grands noms comme JPM émettent avec des spreads plus importants qu'il y a un an. Les coûts de financement pour les emprunteurs continuent d'augmenter, poussant certains émetteurs à repousser leur projet de lever de fonds dû aux conditions difficiles du marché primaire. Nous glissons vers une nouvelle ère, où l'argent n'est plus à bon marché, et la volatilité due à l’incertitude ne fera qu'accentuer l’écartement des spreads auxquels nous sommes actuellement confrontés.
Publié dans le commentaire hebdomadaire "Matinale Express - Actions" de la salle des marchés de la BCV, le 5 juillet 2022